13 juillet 2010

Harvey Pekar avec Sparklehorse

C’est pas du tout du tout ce que je voulais poster aujourd’hui. Mais tant pis.

L’autre jour, je pensais à Kurt Cobain. En fait, je regardais le doc sur Courtney Love parce qu’Elixie avait dit de regarder le doc sur Courtney Love et que je fais ce qu’elle dit parce que c’est quelqu’un de goût au blog exquis.

Je pensais donc à Kurt. Je pensais que je comprenais que quand on a très mal au ventre depuis des années (Kurt était fragile du bidon) et qu’on est atrocement malheureux depuis des années (Kurt était fragile de la tête), et qu’on a plein de choses très bien pour être heureux mais qu’on continue à se sentir mal-à-mourir et bien justement on se rend compte que rien ne suffira à arranger notre mal-être et un jour, on décide que ce n’est pas supportable d’être aussi malheureux alors on meurt. On quitte. On démissionne.

Je pensais donc à tout ça et puis hier soir, j’apprends la mort de Harvey Pekar. Je ne sais pas si Harvey Pekar s’est suicidé (on attend l’autopsie, il avait un cancer de la prostate) mais une chose est sûre : Harvey Pekar était un dépressif chronique.

Et justement, les journées comme hier où le travail devient horrible, je repense souvent à Pekar, à sa description de ces journées affreuses et banales, et sa phrase « la vie ordinaire, c’est un truc assez complexe ».

Pekar était scénariste de bande-dessinées. Il ne parlait ni de super-héros, ni de personnages lambda. Il parlait de lui. Un mec gros râleur perpétuellement déprimé, mécontent, brutal et drôle. Son grand oeuvre c’est American Splendor. Certaines des planches d’American montrent seulement Pekar se levant le matin pour aller au travail en se demandant à quoi ça rime. Dans l’article de Télérama, j’ai retrouvé cette citation de Pekar sur le sujet récurrent de ses BD : « ces faits de la vie de tous les jours qui ont plus d’incidence sur une personne que n’importe quel évènement traumatique ou spectaculaire. Il s’agit de ces 99 % de l’existence sur lesquels personne n’écrit jamais. »

Je me permets de mettre des photos de ces dessins sans autorisation (mais Serge, son éditeur pour la France ne m’en voudra pas) :

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Pekar n’a pas marqué une période de ma vie. Rien n’y est attaché. J’ai seulement eu ce sentiment de reconnaissance, d’intimité avec un inconnu qu’arrivent à créer certains artistes quand ils touchent juste. Du coup, quand on apprend leur mort, c’est comme d’apprendre celle d’un ami qu’on a jamais rencontré mais qu’on connait quand même. La dernière fois que ça m’a fait ça, c’était en mars dernier quand Mark Linkous, le chanteur de Sparklhorse, s’est tiré une balle dans le coeur.

Mais plutôt que de s’apitoyer, c’est l’occasion pour ceux qui aiment la BD indé de découvrir un de ses plus grands auteurs.

Pour ceux qui n’aiment pas la BD indé, c’est l’occasion de voir un film coolos.

American Splendor avait été adapté au cinéma il y a quelques années. De façon brillante. Comme la BD représentait toujours Pekar mais dessiné par des auteurs différents (notamment Crumb), le film mêlait dessins, scènes de fiction, interview de Pekar, émissions dans lesquelles il apparaissait (il avait fait scandale chez Letterman).

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13 commentaires pour “Harvey Pekar avec Sparklehorse”

  • Merci je me cherchais justement un truc à louer ce soir !

    le 13 juillet, 2010 à 21 h 43 min
     
  • merde, mais pourquoi ils s’en vont ?
    pourquoi c’est pas les gros méchants, les vrais odieux qui foutent le camp avant, pour nous laisser essayer d’aimer la vie en paix ?

    le 14 juillet, 2010 à 0 h 31 min
     
  • J’ai ressenti la même chose quand Mano Solo est mort (à ceci près que je ne suis ni n’ai jamais été séropositive/droguée à l’héroïne et mourante pendant des années).
    Parfois des gens nous touchent au-delà de l’expérience commune, parce qu’ils savent mettre de beaux mots sur la leur et faire de leurs pires erreurs un hymne à la vie, ça nous rassure sur celles qu’on aurait pu commettre et ça nous déculpabilise quelque part de celles, moindres, qu’on a commis… Merde, penser à Mano Solo me rend toujours nostalgique !

    le 14 juillet, 2010 à 0 h 35 min
     
  • C’est horrible ces morts d’artistes torturés et tellement talentueux. Je veux rappeler ici que Kurt Cobain était avant sa mort, victime des drogues psychiatriques depuis des années. Ce n’est pas quelque chose dont on parle beaucoup (les laboratoires pharmaceutiques s’en assurent…)mais ces drogues causent 1000 fois plus de mal que de bien, elles ne guérissent rien et pour la plupart poussent dans les faits au suicide. Je n’ai pas assez de données sur Pekar ou Linkous mais je ne serais pas étonnée d’apprendre qu’eux aussi étaient tombés dans les mains des psychiatres. Merci pour ce post plein de tendresse et de respect.

    le 14 juillet, 2010 à 0 h 39 min
     
  • deux posts de déprime in a row, mais que fais partenaire de vie ?!

    le 14 juillet, 2010 à 0 h 52 min
     
  • Quelle plaisir de fréquemment se délecter grâce à toi de nouvelles découvertes infiniment enrichissantes… Ma curiosité est sans cesse piquée au vif à presque chacune de tes évocations de personnages ou d’oeuvres mythiques ou pas forcément mythiques, mais parfois mystiques… Titiou Lecoq, ou l’emblème français de la culture (…oui, je sais, facile…).
    Si tu pouvais, en termes de stimulation existentielle, te complaire dans cet état neuro-végétatif durant une majeure partie de l’été, tu nous en verrais ravis, cela approfondirait indéniablement notre savoir ! en disant « nous », bien sûr, je parle des gens du sud qui n’ont PAS DE TRAVAIL et n’ont d’autres choix que de lézarder sur nos belles plages en attendant ton prochain post… ;-)
    markiiii !!!!

    le 14 juillet, 2010 à 8 h 17 min
     
  • chiotte, désolé pour la grrrosse faute…

    le 14 juillet, 2010 à 8 h 30 min
     
  • Merci Titiou

    le 14 juillet, 2010 à 10 h 06 min
     
  • Whooo… Harvey Pekar.. mort, ben merde.

    Je blogue grâce à lui depuis sept ans. J’ai même pris un emploi de bureau avec des tonnes de dossiers de pensionnés pour stimuler la traduction du quotidien en mots. On peut dire qu’il a changé ma vie.

    le 14 juillet, 2010 à 11 h 11 min
     
  • « Un mec gros râleur perpétuellement déprimé, mécontent, brutal et drôle. »

    Alors en fait, Harvey Pekar, c’est Pierre Ménès ?

    le 14 juillet, 2010 à 13 h 12 min
     
  • L’espèce humaine est globalement dépressive parce qu’elle n’a pas de but précis (dans la vie) . Certains ne font que refléter l’état des lieux.

    le 15 juillet, 2010 à 0 h 21 min
     
  • ah ouais, gros gros film american splendor

    le 15 juillet, 2010 à 14 h 07 min
     
  • Oh! Voilàune triste nouvelle!
    Comme beaucoup de gens, j’ai découvert Harvey Pekar via l’adaptation cinématographique (excellente!) d’American Splendor…

    C’est un bel hommage que tu rends à ces deux messieurs bien trop méconnus à mon goût.

    le 15 juillet, 2010 à 15 h 04 min
     

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