21 mars 2019

KOI29

Alors ? Koi29 ?

Rien. Ma vie est d’une banalité totale. Mettez ici une voix en auto-tune. « ma-vie-est-dune-banalité-totale-ouais ».

D’où l’inaction de ce blog. Mais je suis également animée d’un souci d’archiviste qui me pousse à faire plus ou moins régulièrement un post récapitulatif de ma vie. Soyons thématiques.

D’abord, la drogue.

De son temps, mon père a battu des records malheureusement non homologués de plus gros consommateur de drogues en quantité et en diversification. (Fut une époque où il faisait infuser des plantes hallucinogènes dans un alcool local en plein soleil en Inde pendant plusieurs jours. Après il le buvait. Bien plus tard il se réveillait et le jeu consistait à retrouver où il était.) Bref, cela explique que je sois totalement immunisée face aux séductions des drogues. Mais voilà, ces derniers mois m’ont permis de découvrir que nombre de mes proches ou moins proches prenaient de la drogue. Rien d’étonnant me direz-vous. Non mais attendez, moi, comme une vieille pintade blanche, j’ai eu le cul transpercé de découvrir qu’ils parlaient de leur sevrage comme des… bah comme des toxicos en fait. (Ceci étant, j’ai aussi dû faire un sevrage, mais d’autre chose, mais ça sera un autre sujet, d’un prochain post, parce que prochain post il y aura.) Donc ils se sont sevrés. Parce qu’ils consommaient quasi tous les jours. Boudiou ! Et moi je n’ai jamais rien vu. Enfin… J’ai bien vu le moment en soirée où les gens ont commencé à prendre des drogues. Mais j’ai complètement loupé le virage, dix ans plus tard, où ils en prenaient aussi le matin avant d’aller bosser. Ce qui m’a également amenée à m’interroger sur la nature de la différence d’un même comportement à deux âges différents. Ce qui à 25 ans passe pour un yolo-déglingos et qui à 35 ans devient un vrai problème. Ca commence son blog avec des photos de soirées hype, et ça finit avec des potes toxicos… (De manière inexplicable, ou alors par la culture française, j’ai l’impression qu’il se produit le schéma inverse avec l’alcool. Quand vous êtes jeune, on vous dit de faire attention à ne pas trop boire, par contre, à quarante ans, plus de souci pour vous siffler tranquille votre boutanche.)

De là, nous pouvons ajouter à la longue liste des ‘tu sais que t’es vieux quand’, « tu sais que t’es vieux quand l’usage des drogues n’est plus récréatif ».

Puisque nous parlons de vieillesse, j’ai découvert un nouveau signe de décatissement inattendu : à un moment, ramollissement généralisé du ventre + perte d’élasticité de la peau = ton nombril ressemble de plus en plus à un petit anus.

Si si.

Rentrez votre ventre au maximum et regardez. Si vous êtes vieux ou vieille, vous n’avez plus un délicat nombril mais un trou vers lequel tendent des dizaines de petits plis mous. Moi, j’appelle ça un anus.  

Tu sais aussi que t’es vieille quand ton plus grand lieu de découvertes musicales ce sont les pubs pour voitures.

De là, je dois m’interroger : la grosse grosse obsession Balzac que j’ai développée depuis un moment est-elle un autre signe du temps qui passe ?

Moi à Saché, devant le lit de Honoré. BALZAC A DORMI LÀ, PUTAIN.

Moi devant son ancienne imprimerie. BALZAC A VECU LÀ!

Moi et sa meuf Eve Hanska

HONORE PRENDS-MOI COMME LA PRUSSE.

Donc en fait, dans la vie, je veux devenir une spécialiste de Balzac mais en version lol. Une spécialol. Ce qui évidemment a donné lieu à… l’écriture d’un livre.

Ouais.

J’ai écrit une biographie de Balzac.

Pour de vrai. (Sinon, cette blague serait nulle.)

Elle sort en octobre prochain.

Attendez, on m’appelle.

– Allô ?

– Bonjour, Monsieur Damien à l’appareil, du CIC Parmentier. Mon logiciel vient de m’envoyer une alerte concernant un message publié sur votre blog et qui pourrait impacter sérieusement votre situation financière. Ce n’est pas sérieux cette histoire de spécialol de Balzac ?

– Bah non, bien sûr. C’est une vraie biographie de Balzac, agrémentée d’un style moderne et caustique.

– Mais c’est à l’occasion d’une date anniversaire particulière pour lui ?

– Heu… non. Enfin… C’est les 120 ans de sa naissance mais tout le monde s’en branle.

– Alors au moins, il est au programme du bac l’an prochain ?

– Non plus. Ils nous ont encore collé du Hugo.

– Ah.

– Ouais. Je sais. Mais le plus important, n’oubliez pas Monsieur Damien, c’est que mon livre est génial. Un pur plaisir de lecture.

Ma vie s’est donc récemment résumée à : les enfants et Balzac. (Les enfants et Balzac, à table! ça serait un chouette titre, non ? Ça serait l’histoire d’une meuf qui raconte qu’elle écrit une bio de Balzac mais qu’en même temps, elle prépare des petits pois pour ses gamins.) (J’incarnerais évidemment la meuf, les enfants et Balzac.) (Gens du cinéma, contactez-moi ainsi que Monsieur Damien, CIC Parmentier.) Niveau enfants, bah comme c’était prévu et prévisible, ils ont désespérément grandi. Et là, encore une fois, la vie est servie avec un mode d’emploi et une carte qui t’indiquent très clairement où tu en es. Par exemple, tu sais que ton enfant a grandi quand tu ne peux plus faire tranquillement tes trucs de mère folle d’amour. En situation, ça donne : l’autre jour, Têtard et Curly regardaient les photos de mon téléphone.

Têtard me demande « c’est quoi ça ? »

– Et bien… et bien… Tu vois bien… Ce sont des photos de vous en train de dormir, réponds-je un peu gênée. (C’est l’autre signe que le temps a passé, tu sens qu’il va te juger.)

– T’es venue, dans notre chambre, nous prendre en photo, la nuit, quand on dort ?

– Oui…

Gros soupir de l’enfant. J’ai senti le “j’ai pas le courage de lui expliquer qu’elle ne doit pas faire ça, que c’est putain de flippant d’avoir une mère qui fait ça”. Depuis, je continue d’aller les regarder dormir mais je ne prends plus de photo.

Je n’ai jamais parlé écriture inclusive avec Têtard mais j’ai très tôt remarqué qu’il en employait de lui-même certaines formes. Et qu’il me reprend. Par exemple, un soir où il me disait « toi, ton travail c’est d’écrire des livres » j’étais occupée à boire mon verre de vin rouge (je vais avoir quarante ans) et je marmonne en mode automatique « oui, c’est ça, moi je suis écrivain ». Paf ! Il m’a corrigée « non, toi tu es écrivaine ! ». Souvent, il invente (ou plutôt réinvente) spontanément des formes féminines.

Evidemment, je fais attention quand je lui lis un livre sur la préhistoire de remplacer les hommes préhistoriques par les humains préhistoriques (ce qui me faisait bizarre au début pour une simple question d’habitude alors que lui, ça ne lui écorche pas du tout les oreilles.) D’ailleurs, si les maisons d’édition pouvaient d’elles-mêmes faire gaffe hein… (Les enfants, Balzac, et les humains préhistoriques, à table!) (C’est pour le second volet de la saga.)

Quand je lui ai lu Harry Potter, dedans il y a une femme que la traduction présente comme « le professeur McGonagall ». Je lis comme c’est écrit. Et il m’a corrigé « non c’est la professeuse McGonagall ». Je lui dis « oui, tu as raison ». On continue, je lis encore « le professeur McGonagall ». Il s’énerve « non ! C’est la professeuse ! ». Je lui explique que je n’y suis pour rien, que c’est écrit comme ça dans le livre. Il m’a répondu « et bien tu corriges quand tu le lis. Sinon ça me dérange, je ne vois pas une dame. » Ok.

On a tous remarqué que la plupart des « fautes » que font les enfants en parlant n’en sont pas. Ils appliquent la logique linguistique la plus pure. Je crois que c’est pareil là.

Sinon, Têtard, qui n’a jamais été un modèle de sérénité, s’est totalement radicalisé. Pas sur une religion classique, il est radicalisé d’Olive et Tom. Le dessin animé. Il y avait eu une première phase. Puis un sevrage. Et là, il est totalement retombé. Et en revoyant les épisodes, je comprends. Olive et Tom c’est le Bollywood du foot. Rien n’est jamais too much.

Donc j’entends Têtard qui grommelle devant l’écran “mais c’est qui ce Marc Landers…” Et un jour, à la fin de l’épisode, il pète un plomb. Il tape du poing sur la table, secoue la tête nerveusement. Je lui demande ce qui se passe « Ils disent que c’était match nul. Comment ils peuvent dire ça ?? Olivier est le meilleur joueur du monde, il a fait un match incroyable. Pas un match nul ! »

J’ai ri, mais ri.

Quant à Curly. C’est un amour absolu (comprendre : il est en plein Œdipe). Mais je ne le connais pas très bien. Il est assez mystérieux. Ce que je sais avec certitude c’est qu’il m’aime, qu’il ne dort jamais et qu’il fait caca aux toilettes.

6 années et quatre mois. C’est le temps que j’ai passé les mains dans la merde.

Avant, quand j’étais jeune, je disais souvent que j’étais dans la merde. Quand j’ai eu des enfants, l’expression a pris un tout autre sens. J’étais concrètement dans la merde. J’en avais régulièrement sur les mains, sur mes fringues. J’en essuyais. J’en nettoyais. J’en jetais.

J’ai même eu une poubelle à merde. Une poubelle qui emballe les couches pleines de merde pour que l’odeur ne se répande pas partout. (Parce que le passage à la diversification alimentaire, c’est olfactivement assez violent. Votre petit bébé qui faisait des cacas trop mignons se met à chier des bouses comme une grosse vache normande.)

Cet hiver, je devais rejoindre Romain et Rosie à l’inauguration du salon du livre de Montreuil. Juste avant, j’essuie les fesses pleines de merde liquide de Curly. Je suis hyper pressée, je fais vite, je fais attention de ne pas m’en mettre partout. Je suis fatiguée, je me frotte les yeux, je me lave les mains, je pars. Deux heures plus tard, mes yeux sont purulents.

Parce que j’avais introduit du caca dedans. Dans mon oeil.

6 années et quatre mois de relation intime avec des matières fécales étrangères.

C’est un truc dont on n’a pas conscience quand on est adulte. Quand on s’engueule avec notre parent, on oublie que cette personne a sûrement vu de la merde sortir de notre anus. Nous, on a oublié mais cette personne s’en souvient. Je pense que cette dissymétrie du souvenir fécal explique une bonne partie des incompréhensions enfants/parents.

Et pour conclure, tant qu’à parler de truc de parents, j’ai fait une activité coolas avec les enfants, et qui s’aménage à mon avis bien pour plein d’âges différents. Je leur ai imprimé à chacun un plan du quartier. En expliquant comment ça fonctionne (genre c’est vu d’en haut). J’ai ajouté des abscisses et ordonnées. On a noté la maison et on a cherché dessus les autres endroits où on va et puis on l’a emportée pour se déplacer et comparer la vraie rue et le plan pour mieux comprendre. (Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais les enfants adorent les cartes.) Après, j’ai fait découvrir Google Earth à Têtard, on a dézoomé depuis la maison jusqu’à l’univers et c’était wahou. Je vous conseille si vous avez le temps. Surtout que les enfants et la compréhension de l’espace ce n’est pas toujours hyper évident.

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13 commentaires pour “KOI29”

  • J’ai éclaté de rire ici: « D’ailleurs, si les maisons d’édition pouvaient d’elles-mêmes faire gaffe hein… (Les enfants, Balzac, et les humains préhistoriques, à table!) (C’est pour le second volet de la saga.) »
    Sur mon lieu de travail, voilà ! Merci.

    le 21 mars, 2019 à 17 h 52 min
     
  • « Tu sais aussi que t’es vieille quand ton plus grand lieu de découvertes musicales ce sont les pubs pour voitures » – Respect :)

    le 21 mars, 2019 à 20 h 13 min
     
  • Mais au fond est-ce que Delacroix aurait pu peindre Balzac? Et l’a-t-il fait?

    le 21 mars, 2019 à 20 h 14 min
     
  • « C’est les 120 ans de sa naissance mais tout le monde s’en branle. »

    Tout le monde s’en branle, même l’autrice de la biographie a oublié que c’est les 220 ans de sa naissance :-)

    le 21 mars, 2019 à 23 h 46 min
     
  • Je t’aime Titiou. C’est tout.
    Et vive Balzac !
    Tu as visité sa maison à Paris aussi je suppose ?

    le 22 mars, 2019 à 0 h 22 min
     
  • Ça fait plaisir d’avoir de tes nouvelles, littéraires et familiales. :-)
    La lecture inclusive : voilà qui fait avancer les choses ! :-)
    À bientôt dans une librairie pour savourer cet ovni. :-)

    le 22 mars, 2019 à 11 h 32 min
     
  • bon bah je m’en fous moi de Balzac mais je suis sure que vu par un specialol ça sera passionnant.

    le 23 mars, 2019 à 15 h 50 min
     
  • Je crois que quoi que tu écrives, je le lirai et je passerai un bon moment
    Vivement la sortie de la biographie de balzac façon specialol, et en attendant, merci de repasser par ici !!
    Ps :pour ma part, le fou rire, c’était pour le passage cacatesque et l’impact sur les relations parents / enfants (bcp d échos chez moi, mon fils a 5 ans…) devant les évadés à la télé… j ai eu droit à un coup d’oeil intrigué du chéri

    le 26 mars, 2019 à 22 h 21 min
     
  • Bonjour, ravi de voir que nos horloges biologiques tournent synchrones.
    J’ai une requête. Tu voudrais pas aller fouetter/chatouiller les « Studio404 », empêtrés dans une sale affaire de « Ligue du Lol ». Ils menacent fermer. Je me figure que la rencontre serait formidable… (s’il le faut, je veux bien préparer les questions). BigUp!

    le 27 mars, 2019 à 10 h 18 min
     
  • Mais je suis tellement heureuse de te lire….!
    Je ne sais pas si j’ai déjà osé commenter, j’aurais dû le faire depuis bien longtemps (début de ton blog ou presque…oui), bref, merci de revenir par ici, même si j’ai ma petite dose chaque semaine sur Slate, c’est quand même pas pareil.
    Bref un petit hug virtuel, et un merci sincère de poursuivre ce blog.
    Je n’aurais jamais pensé un jour mettre une biographie de Balzac dans ma liste de livres à lire…! La vie est pleine de surprises, chouette :)

    le 27 mars, 2019 à 18 h 37 min
     
  • quel plaisir de venir ici par habitude et de trouver non pas 1 mais 2 posts… Très curieux de lire la biographie. Et la suite des aventures de Curly et Tétard. <3

    le 3 avril, 2019 à 10 h 59 min
     
  • Je n’étais plus venu sur ce blog depuis des mois (des années ?)… grosse erreur.

    le 22 mai, 2019 à 9 h 37 min
     
  • Je croyais être la seule à avoir tenté de féminiser l’oreille de mon fils, mais non ! Si chaque mère et père le faisaient systématiquement et sans relâche, les grammairiens seraient obligés de s’avouer vaincus, qui essaient encore de nous faire croire que parler des droits de l’Homme au lieu de Droits de l’être humain, c’est pareil, car le « H » majuscule (que l’on entend très bien, n’est ce pas ?) signifie qu’il s’agit de l’Humanité entière. Un changement anodin en apparence mais qui mettrait un terme à un lavage de cerveaux encore permanent. Parents, n’hésitez pas un faire ce travail de fourmi auprès de votre progéniture…

    le 29 juin, 2019 à 11 h 20 min
     

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