29 avril 2009

Live-blogguer le néant… un art de vivre

Comme aujourd’hui marque mon dernier retour au-travail-qui-m’a-permis-de-manger-un-kilo-de-pasta-par-semaine-pendant-trois-ans, je fête ça avec un petit live-blogging à l’ancienne (vous vous souvenez, le temps lointain où Zapette et moi on était des copines for ever… tiens, petit tacle amical). Et puis, ça me fera des souvenirs.  

7h50 : arrivée au travail. HANN, putain j’ai trop merdé complètement ce matin. Je suis en avance, la grosse honte. Je m’en veux à mort. J’espère que personne ne m’a vue. Ma réputation est en jeu.

7h55 : satisfaite, je contemple la succession des onglets sur l’ordi. Facebook, yahoo, gmail, netvibes, le blog. Tout va bien. Je devrais pouvoir survivre.

8h10 : je vais voir ma copine l’intendante. « Salut, ça va ? » Sourire crispé de sa part. « Super… Sur les deux agents d’entretien, on est à 100% d’absents. Ria parce que son vol a été annulé et qu’elle a pas trouvé de place avant samedi prochain… Sans commentaire… Et Patrick bah… il a appelé pour dire qu’il ne voulait plus venir. Sandra est absente pour la semaine. La secrétaire a prolongé son arrêt de travail. Voilà… super, super. »


8h30 : il est temps de prendre ma première pause clope. Je suis d’une bonne humeur suspecte à mes propres yeux.

8h40 : je vais pisser, ça fera passer le temps. Je me ramasse méchamment la gueule en voulant m’asseoir sur les toilettes. Après enquête, je suis clairement victime d’un attentat. Quelqu’un a dévissé le siège en plastique des chiottes… Cons d’élèves…

8h45 : mon chef se cale dans son fauteuil et sort 20minutes. (Je ne me fais pas d’illusion sur ces quelques minutes de répit, je sais pertinemment que sa capacité de concentration est de 7 minutes.)

8h52 : mon chef saute sur l’infirmière qui a eu le malheur de passer devant le bureau et entreprend de lui raconter ses vacances en Ethiopie. (7 minutes pile. Je le connais comme si je l’avais fait.) Je me demande si un mercredi matin, elle peut décemment être intéressée par le fait que les pèlerins ont été interdits de voyage à Jérusalem à partir de 1170. (Là, vous sentez toute l’authenticité de mon témoignage, un truc comme ça, ça ne peut pas s’inventer.) Je note au passage que, trente-cinq minutes après son arrivée, grand chef a réussi à prononcer deux fois le mot « race ».

9h10 : « Si Obama ne fait rien, on est mal barrés. » (Vous aurez compris que je ne travaille pas à Sciences Po ou l’ENA.)

9h13 : « c’est ce que j’appelle la communautarisation rampante ». Mon chef, il est producteur officiel de concepts merdiques.

9h16 : le téléphone sonne. L’infirmière en profite pour se faire la malle.

9h21 : Chef s’ennuie. Il sort du bureau puisque, de façon évidente, la petite garce que je suis refuse de deviser géo-politique avec lui.

9h30 : la chef des travaux me demande si je suis occupée. J’hésite. Elle a l’air désespérée et je me sens d’humeur généreuse. Je me dis qu’après une heure trente de présence, il est envisageable de travailler un peu. 
10h49 : la dernière fois que j’ai vu le chef, il lisait l’Officiel des spectacles. Depuis, il a disparu. Je ne peux pas imaginer une seconde qu’il ait déserté le boulot pour se masturber dans une salle de cinéma. Ca serait tout bonnement impensable. 
12h45 : c’est l’heure glauque. Celle où la fatigue me gagne. 
14h : le chef s’est tiré avec 45 minutes d’avance. Et c’est parti pour quatre heures de glande absolue. Allez les enfants, on lève les mains bien haut. Wouaiiis !!! C’est la teuf! 
14h02 : je m’ennuie. Je devrais mettre à profit ces quatre heures pour pondre de l’article, gratter du papier, user du clavier mais mes 3h de sommeil m’en empêchent. Je préfère me livrer à de l’espionnage informatique sur mes proches. 
14h20 : notre stagiaire de 40 ans, dont 15 passés dans l’armée de l’air autant dire une femme d’action, vient de se trainer dans mon bureau comme une âme en peine. Elle m’a dit « c’est calme là quand même, non ? » Je lui ai demandé depuis quand elle bossait chez nous. « Lundi » elle m’a dit. J’ai répondu « bah voilà… tu vas t’y faire. On s’y est tous faits. » (Comme elle est sympa, j’ai failli lui suggérer d’ouvrir un blog – genre « j’te refile un bon moyen de ne pas mourir d’ennui au boulot »- mais ça va… y’a assez de concurrence comme ça. Heureusement que Julie F. a complètement abandonné son blog, ça en fait une de moins – grâce à mon merveilleux stratagème qui consiste à promouvoir les bienfaits de l’alcool auprès de toutes les blogueuses que je rencontre. Vous verrez, d’ici la fin de l’année, il ne restera plus que moi sur l’inter-web français.)
Pour ceux qui suivent courageusement ce live-blogging, une récompense : 

16h : je suis en plein travail (ça arrive rarement certes). Le téléphone sonne. Je réponds. « C’est Véro, Mme Nil a trouvé un i-phone dans les toilettes. Si un élève le réclame, c’est chez moi. » Je réponds ok. Je raccroche. Je continue de travailler en disant à mon collègue « un i-phone, tiens, c’est bizarre, c’est pas le genre de nos élèves… Tiens d’ailleurs, il est où le mien… Ah… il est plus là… il est plus là il est plus là.« 

Je me précipite sur le téléphone. « Allô ? Véro ? Je crois que c’est mon téléphone.
– Attends, je le déverouille pour vérifier. 
    Je parle d’une voix calme et hypnotisante. 
– Non Véro, ne fais pas ça. Ne lis pas mes messages. Vraiment. Je crois que ça vaut mieux. 
– AHAHAH… *éclat de rire démoniaque de Véro avant de raccrocher* 
Je vole jusqu’au deuxième étage et lui arrache mon téléphone des mains. Ouf… Juste à temps. Je redescends bien tranquillement. Arrivée au rez-de-chaussée, je croise Mme Nil qui me demande « Véro t’a prévenue pour l’i-phone que j’ai trouvé ? » 
– Oui, pas de problème. 
– J’ai regardé dedans pour savoir à qui c’était mais j’ai pas trouvé… 
– Ah… En fait, c’est le mien. 
Le regard de Mme Nil se fige brusquement, elle tourne les talons et s’en va d’un pas précipité. 
J’ai l’impression qu’elle me voit sous un jour différent. 
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Un commentaire pour “Live-blogguer le néant… un art de vivre”

  • mais c’est pas possible ! tu bosses où à l’éducation nationale pour te faire autant c**** ?

    je passe d’écoles primaires en lycées et services académiques et je vois rarement un pareille glande. Quand à moi, je me dis que si j’assure à fond j’arriverais peut être à n’être en retard que de 6 mois au lieu d’un an sur les chantiers prévus.

    un tel ennui, ça doit miner à force, pas étonnant si tu picoles :-)

    le 14 juillet, 2010 à 2 h 29 min
     

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