4 mars 2009

Chiottes n°3

J’ai une vie tout à fait fascinante (heu… non… ça c’est une autre blogueuse). En fait, j’ai pas du tout une vie fascinante et encore moins en ce moment. Dans le genre les trucs pas du tout fascinants qui me sont arrivés la semaine dernière, j’ai passé une heure à Marseille. Une heure seule en début de soirée à trainer à la gare de Marseille qui, ceci dit, est très jolie. Mes photos ne lui rendent pas suffisamment hommage mais bon.

Je déambulais donc dans la gare réfléchissant à l’insoutenable légèreté de l’être, au fait que l’homme est un plein qu’il ne peut quitter et que chaque conscience recherche la mort de l’autre, quand je me suis dit « tiens, si je faisais pipi ». Il y avait la queue aux toilettes de la gare mais rien ne m’arrêterait dans mon grand oeuvre des guides de chiottes, je pensais aux milliers de lecteurs qui ne manqueraient pas de se féliciter de l’ajout des toilettes de la gare de Marseille. Je me mets donc dans la file d’attente. A Marseille, ils n’ont pas peur de mettre les moyens, ils ont à la fois un tourniquet (dans lequel on met 50 centimes pour accéder aux lieux d’aisance) ET une dame pipi qui surveille ledit tourniquet (rien d’absurde hein). Evidemment, je suis un peu choquée par cette taxe de 50 centimes, et comme il y avait un énorme panneau rouge ‘TOILETTES 50 CENTIMES » je vais pour le prendre en photo (rapport à l’exhaustivité de mon guide, c’était quand même une info essentielle).
A cet instant-là, j’étais loin de me douter que je venais de me lancer dans une action kamikaze qui ferait passer Mohammed Atta pour une p’tite bite du terrorisme.
La dame pipi m’a littéralement hurlée dessus à peu près avec la même tessiture que si j’avais uriné sur le mur des lamentations.
« ARRETEZ IMMEDIATEMENT! CA VA PAS LA TETE!! Vous vous croyez où!!! JE VAIS APPELER LA POLICE. »
Après quelques secondes de tétanie, je range mon appareil. Et puis soudainement, je suis prise d’un doute. Ca va, je les connais de réputation les Marseillais. Toujours prompts à faire une bonne blague. Du coup, il me parait évident qu’elle est juste en train de se payer ma tête et que dans trente secondes elle va éclater de rire. Anticipant un peu ce grand moment de réconciliation entre nous, je lui adresse un sourire genre « c’est bon, ça va, j’ai compris, j’ai failli marcher hein » et j’ajoute en gloussant :
– Ok, c’est ça…
– MAIS QU’EST-CE QUE VOUS CROYEZ ?!!!
Désarçonnée, je réponds :
– Bah désolée. Vraiment, je ne pensais pas que c’était grave.
– Mais évidemment que c’est grave. C’est très très grave de prendre une photo.
Là, comprenant qu’il y a sûrement méprise, je rectifie avec une voix charmeuse :
– Mais ne vous inquiétez pas, je ne me serais jamais permise de vous prendre en photo. C’était le panneau que je photographiais.
Qu’est-ce que j’avais pas dit là…
– Ce mur est privé VOUS NE POUVEZ PAS LE PRENDRE EN PHOTO. Je pourrais vous faire arrêter. Je vais appeler la police et vous allez avoir des ennuis. C’est moi qui vous le dis.
Avec les années, j’ai appris à contrôler mes excès de rage, surtout depuis le jour peu glorieux où j’ai failli tuer un petit ami en lui jetant des objets lourds et contondants au visage, mais là, quand même, j’ai eu très envie d’attraper la dame par son chignon et de lui cogner le front contre son comptoir. A plusieurs reprises. Sur le rebord. Jusqu’à ce qu’elle saigne. Mais à la place, j’ai opté pour la stratégie de la cruche.
– Ah bon ? Ah je ne savais pas. J’avais pas conscience que c’était aussi grave. DESOLEE.
(*sentir une légère crispation ironique dans mon DESOLEE*)
– Vous ne pouvez pas prendre de photo de moi ou du mur. Vous n’avez pas le droit.
– Ah. Encore DESOLEE. Mais ça mérite peut-être pas de déranger la police…
Rétrospectivement, je me dis que j’aurais bien aimé voir la tête des flics. Après la dame a harangué les gens qui attendaient patiemment derrière moi. « Elle est inconsciente hein ? Rahlala… Les gens ont plus aucun respect pour rien… » (je rappelle qu’on parle d’un panneau de chiottes là.) Et ensuite, elle s’est retournée vers moi avec un air soupçonneux pour me demander : « Et puis, pourquoi vous vouliez prendre cette photo ? »
Ah… Excellente question.
Qui semble passionner les foules.
Puisque toute la file d’attente se retourne vers moi en attendant ma réponse. Et là, j’ai été déstabilisée. J’avoue. J’allais expliquer que « bin heu je fais un guide des waters de France sur internet » mais j’ai senti à temps que le concept n’allait pas du tout adoucir la dame.
– Heu bin pour un blog, je prends des photos que je trouve drôle.
– Et vous trouvez ça drôle ?!
– Ca dépend si c’est le même prix pour faire caca…
Alors après cet épisode, auquel se résume mon unique contact avec la population marseillaise, je ne veux plus entendre un abruti me dire que « oulala, à Paris les gens sont agressifs, ils sont pas aimables, ALORS QUE DANS LE SUD… » Alors que dans le Sud y’a autant d’enculés qu’à Paris.
Je me suis quand même acquittée des 50 centimes et j’ai pris une photo à l’intérieur de ces toilettes sous haute surveillance. Au demeurant fort propres.
Propres, confortables, présence de PQ, tranquillité, mais franchement des toilettes dans lesquelles une journaliste ne peut pas effectuer normalement son travail, ça mérite un gros malus.
LES CHIOTTES DE LA GARE DE MARSEILLE : 6/10.

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6 commentaires pour “Chiottes n°3”

  • Pas fascinant, pas fascinant, certes mais le ton humoristique et votre style me régalent depuis le découverte de votre blog. Conquis dès les premières lectures, j’ai repris depuis le début. Je prend un grand plaisir à m’esclaffer tout seul devant mon ordi. Une lecture avec des vrais morceaux de rire dedans et non dénué de réflexion et des points de vue qui se défendent…

    Merci… j’ai encore 1 an à lire, je m’en réjoui d’avance.

    L.

    le 18 avril, 2010 à 18 h 58 min
     
  • on aurait quand même bien aimé une photo de la dame pipi devant le panneau. Elle a loupé sa gloire…

    le 1 mai, 2010 à 12 h 30 min
     
  • « Alors après cet épisode, auquel se résume mon unique contact avec la population marseillaise, je ne veux plus entendre un abruti me dire que « oulala, à Paris les gens sont agressifs, ils sont pas aimables, ALORS QUE DANS LE SUD… » Alors que dans le Sud y’a autant d’enculés qu’à Paris.  »

    Ah ah !
    Enfin, le mythe s’effondre ! Le monde entier va connaître la vérité sur les gens du sud ! Et les bretons domineront le monde !

    le 27 mai, 2010 à 15 h 55 min
     
  • Une histoire dans les chiottes visitées par Titou
    Chapitre 3 : Démonstration
    Ce post en introduction au thème de cette conférence, comme vous avez pu le voir de cette expérience individuelle et totalement personnelle, pour illustrer le propos de la thèse que je vais vous résumer et qui a nécessité 4 ans d’investigation:

    Au sujet de la perception du crétin
    Par Ignace Anatole Marc Chauvin

    Comme souligné dans cette expérience personnelle, les crétins sont partout. Nous pouvons même définir que pour une zone géographique assez élargie contenant un nombre important d’individus qui ne se connaissent pas tous, le contre exemple serait une soirée pour mon anniversaire dans mon appartement, le taux de crétin est sensiblement équivalent à une autre zone de taille identique.

    Le Parisien étant défini dans la tête d’un provincial comme étant en fait un Francilien, sa population représente un français sur cinq. Nous pouvons en conclure, que si le nombre de crétins en île de France est dans l’absolu plus important qu’ailleurs, il ne l’est pas rapporté en pourcentage de cette population.

    Donc lors des vacances, par exemple à Marseille, sur 50 touristes français qui occupent les places des toilettes dans la gare, les probabilités montrent que nous aurons alors 10 Franciliens et seulement de 5 Rhônes Alpenais à 0,6 Limousinois (pour le calcul se référer au lien ci-dessous lien 1( INSEE))

    Nos études ont montré que globalement en France, le taux de crétins avoisinent les 53,06% (voir le lien 2 : Resultat de l’election présidentielle 2007) que nous rapporterons à 50% pour la simplitude des calculs.
    Il ressort de ce document que dans nos toilettes marseillaises, seront remarqués parce que crétin, 5 “Parisiens”, 2,5 Rhônes Alpesois et seulement 0,3 limousiniens. D’où la sensation que les Parigots, plus remarquables du fait des absolus numéraires, sont des …

    Or à l’inverse, seulement 10% des personnes étant exceptionnellement remarquable, un calcul simple nous montre que nous aurons 1 Francilien remarquable, et même pas une personne entière pour relever le niveau des Rhônes Alpesiens ou des Limousinais. Il est intéressant de noter que les règles de la multiplication par la population globale d’une région, ne peuvent être appliquées en l’état, parce que deux demi personnes remarquables mises à côté l’une de l’autre ne feront jamais une personne remarquable, la seule région possédant des êtres remarquables est…

    La conclusion de cette étude est que :
    La perception de l’autre se fait en général d’un point de vue quantitatif et non proportionnel et accès principalement sur la perception du mal, car comme nous l’ont montré les calculs, des gens exceptionnels n’habitent qu’à Paris.

    Je vous remercie de votre attention
    I.A.M. CHAUVIN

    le 13 novembre, 2010 à 16 h 38 min
     
  • J’ai vécu la même agression marseillaise à propos des toilettes d’un bar, pour avoir laissé une amie dire que c’étaient « les toilettes les plus glauques » qu’elle avait vu. Et bien toute la rue a pu apprendre ce qu’il venait de se passer (avec les insultes en plus).
    Je suis totalement d’accord, à Marseille il y a autant d’enculé que dans le reste de la France, voire plus.

    le 19 août, 2011 à 15 h 31 min
     
  • – Ca dépend si c’est le même prix pour faire caca…
    On est en 2017.
    J’ai découvert ton blog (que je suis en train de lire depuis le début) après être tombé (par le biais de Google actu) sur ton article concernant Thomas Pesquet.
    Je suis réceptionniste de nuit dans un hôtel à Paris et franchement en plus de me faire entrer dans certains moments de ta vie et donc d’assouvir ma soif de voyeuriste tu me fais surtout rire et la nuit passe plus vite. Donc pour cela je te dis merci. Et quand je vois qu’il me reste encore 8 ans de ta vie à parcourir, je dis que cela n’augure que du bon..

    le 25 janvier, 2017 à 6 h 43 min
     

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